vendredi 31 octobre 2008

Turquie : 3ème round.


Une note un peu décousue, toujours en réponse à Guillaume, sur fond de They Might Be Giants...





1. Tu accordes une grande importance à la géographie. Soit. Si c'est ton bon plaisir. Déroulons donc une carte si tu veux bien... Que fais-tu de Chypre ? Elle est sur le même méridien qu'Ankara et pourtant la partie sud de l'île fait bien partie de l'Europe. En bon scientifique, tu ne veux que des chiffres aussi. En voici : "l'île de Chypre est à plusieurs centaines de kilomètres de la Grèce, qui est membre de l'UE, alors qu'elle se trouve à 70 kilomètres au sud de la Turquie et à seulement 60 kilomètres de la Syrie, qui fait partie du Moyen-Orient." (1) Et personne n'y trouve rien à redire. L'argument géographique n'en est pas un. Quand tu comprendras qu'on est pas là à chipoter sur des bouts de terre, on aura fait un grand pas. Que la Turquie ait 97 ou 96 % de sa superficie en Asie, quelle importance ? On ne juge pas d'une question si importante à partir d'un seul chiffre dérisoire. C'est absurde enfin. Alors, je peux te dire aussi que Chypre est asiatique. Pourtant, elle est dans l'UE. Comment justifies-tu cette contradiction ? Ne pollue plus ce débat avec des arguments qui n'en sont pas. Si tu rejettes la Turquie, je veux que tu me dises que c'est parce que sa culture, ses valeurs, ses traditions ne sont pas assez européennes pour toi, mais ne me sors plus des conneries pareilles. On croirait entendre Giscard.


2. "La faille dans ta culture et l'extrapolation de ton cas à l'Europe en général est très subjéctive ce qui je te cite aura tendance à affaiblir ton raisonnement. Tu es méditerranéenne et tu connais mieux la Turquie que l'Estonie. Et alors ? Tu crois qu'un Russe ou un Norvégien en dirait autant ? Ils sont pourtant Européens, mais pas méditerranéen, ils sont plus proches de ces peuples je te cite à nouveau dont tu ne saurais pas aligner 3 mots sur la culture (moi non plus, ce n'est pas un reproche)."

Ce passage, j'ai adoré. Reprendre mes termes en ma défaveur, c'était bien.

Sinon, tu ne sembles pas avoir saisi mon propos. Ce que j'essayais d'exprimer (maladroitement certes), c'était l'idée suivante : d'un point de vue purement culturel, puisque nous avons accepté les pays baltes, nous pouvons très bien accepter la Turquie. La richesse de l'Europe est en grande partie due à son multiculturalisme. C'est ce qui fait aussi, bien entendu, toute la difficulté à l'unir. Comment allier les moeurs d'un Nordique avec celles d'un Latin ? Comment faire parler d'une seule et même voix tous ces peuples ? Comment créer une Europe sans détruire, ou du moins entacher, nos cultures respectives ? C'est le challenge.


3. "Pourquoi les Etats Unis ne seraient pas Européen ? Parce que qu'un océan nous sépare ?"

Non. Parce qu'ils n'ont pas besoin de nous. Arrête de poser des questions stupides, ça m'énerve.

"Tu dis que la Turquie est proche de nous, moi je te répond que les USA sont proches de la Russie et pourtant ils n'appartiennent pas au même continent"

Ils ont surtout des cultures radicalement différentes. Nous avons quand même beaucoup plus de points communs et d'intérêts à nous unir avec la Turquie que les Russes avec les Américains. Remarque, ça aurait été bien fun pendant la guerre froide. On imagine bien Kennedy et Khrouchtchev ensemble : ça aurait pas été triste. :D

"Je ne vois pas en quoi la culture Turque nous touche actuellement, excépté les Kebab peut être :D"

C'est limite honteux d'oser encore se demander en quoi la culture turque nous touche. Et tout le blabla historique que je t'ai déjà sorti ? Nous avons quand même quelques siècles d'histoire commune. Excusez du peu.


4. "Je te rétorque que les interets commerciaux l'emportent facilement sur les principes moraux et religieux, d'ou l'entente avec Israel." Ai-je jamais prétendu le contraire ? Je ne suis pas si naïve et j'accepte ce principe, aussi politiquement incorrect soit-il. L'entente avant tout, car l'union est préférable à tous.

"Pourquoi les turcs seraient intolérant envers les chrétiens ? mais parce que leur pays n'est pas laic et que malgré tous leurs principes pseudo-démocratique dans leur forme de gouvernement la religion est mélée a la politique ( Un sacré retour en arrière en France non ?)."

La France est un cas bien particulier. On ne peut comparer notre laïcité à aucune autre. C'est une spécialité française. Dans la plupart des pays, la religion est bien plus présente, et ce, même dans les plus grandes démocraties. Sans parler des US, en Allemagne ou en Italie par exemple, la religion est davantage ancrée dans les moeurs. Un exemple tout con : dans les hôtels allemands, on place des Bibles dans les chambres. Chose totalement improbable et impensable en France ! La laïcité n'est définitivement pas un facteur pour entrer dans l'Union ; c'est la tolérance de toutes les religions qui l'est. S'ils tolèrent les juifs, les musulmans Turcs peuvent bien tolérer les chrétiens. J'ajouterai que les chrétiens n'ont aucune leçon à donner. Tu les crois tous tolérants peut-être ? Beaucoup ne voient dans l'islam qu'une religion fanatique.

"L'islam une religion de paix ? Autant que le christianisme il y a des siècles. La montée de l'extremisme et des attentats fanatiques ne peuvent etre nié, sans entrer dans la psychose, la religion musulmane est en proie a une accentuation de la violence, non pas tous les musulmans il ne faut pas généraliser, mais une masse suffisament importante pour mettre en danger l'équilibre religieux. N'oublions pas les interprétations religieuses, suivies par trop de personnes, comme quoi il faut tuer l'infidèle."

L'islam est une religion de paix. Comme toutes les religions, elle a vocation à transcender l'humain et la métaphysique. Tu le dis toi-même : ce sont les interprétations qu'il faut condamner, et non la religion.


5. "Pourquoi l'Europe ne peut pas agir avec la Turquie, et en tirer profits des deux cotés, sans pour autant qu'elle fasse partie de l'UE ?"

La Turquie n'aurait rien à gagner si elle n'intègre pas l'Union. Tu crois vraiment qu'elle accepterait de se faire plumer sans en tirer aucun bénéfice ? A la clé de l'adhésion, il y a pour elle un important gain économique. Le pays pourrait connaître une croissance et un développement considérable. Pour nous, ce serait par exemple l'occasion de renforcer le poids diplomatique de l'UE dans le monde. Avec l'armée turque, nous pourrions intervenir avec plus de vigueur dans les zones de conflits.


6. "Le jour ou la Turquie sera une terre laique de tolérance politique et religieuse, profondément démocratique ou en tout cas respectueuse des droits de l'homme ( et de la femme ), reconnaissant ses torts passés comme le génocide des arméniens, alors oui, elle méritera des relations plus étroites avec l'europe, et pourquoi pas son entrée dans l'UE si les critères géographiques sont modifiés."

Ravie de te l'entendre dire. Je suis peut-être idéaliste, mais j'y crois. Je pense que le pays fait des efforts en ce sens et qu'il est de notre devoir de l'encourager.



7.
"et le problème Kurde ?"

Oui, c'est vrai. On n'en avait pas encore parlé. C'est un problème qui ne concerne pas que la Turquie d'ailleurs. Des Kurdes, on en trouve aussi en Irak, en Iran et en Syrie. Certainement encore un peu ailleurs, mais le principal est concentré dans cette région. Pour être honnête, je suis franchement ignorante en la matière. Je me renseignerai : si je trouve un article intéressant ou autre chose, je le posterai. Sinon, comme ça, c'est vrai que j'aurais plutôt tendance à être favorable à la création d'un Kurdistan. Il me semble naturel qu'un peuple qui partage des valeurs communes puisse se constituer en Nation. Maintenant, ils ne forment pas véritablement un peuple. Ils parlent plusieurs dialectes. Ils sont éparpillés dans leurs montagnes. Ce sont des nomades. Et la profusion des Etats dans le monde est assez inquiétante comme ça pour qu'on aille en ajouter encore un de plus. Quant à la répression qu'ils ont subie et qu'ils subissent encore, elle est évidemment condamnable et doit être condamnée. Je ne remets absolument pas en cause le fait qu'ils aient été malmenés, que ce soit par Sadam Hussein ou par les Turcs. Comme je l'ai déjà dit à maintes reprises, je ne cherche pas à effacer les fautes commises par ce pays. Toutes les nations ont des parts d'ombre. Je ne tente pas non plus de minimiser les travers toujours existants. Mais il s'agit d'une évolution logique et souhaitable, dans la continuité de la politique d'agrandissement de l'Union européenne.



(1) Source : Courrier International. En annexe, la suite de l'article : "Quand vous montrez une carte à ces handicapés de la géographie et que vous leur démontrez l’erreur de leur logique qui voit "Chypre en Europe et la Turquie en Asie", ils se tournent vers l’histoire. Et, si vous leur dites que les Turcs aussi ont écrit cinq cents ans de l’histoire européenne, ils vous rétorquent : "Mais il s’agit de l’histoire musulmane ; nous, on parle de l’histoire chrétienne." Ils font fi de ces millions de musulmans qui vivent en Europe et sont leurs propres citoyens. Seul un racisme aveugle peut ignorer à ce point le passé, le lire comme il veut ou ne pas le lire du tout."

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