mardi 28 octobre 2008

Turquie : suite et fin.


"N'aie pas peur, ce ne sont pas les Turcs. Ce ne sont que la lune et l'étoile du soir". © Hanel
Trouvé dans l'excellentissime European NAvigator.


En réponse à Guillaume. J'ai repris point par point tes phrases. C'est ce qui me semblait le plus explicite. Allons-y.


1. "Ce pays possède 97% de ces terres en Asie pour seulement 3% en Europe." Ah là, tu m’as presque fait rire. Tu la sors d'où celle-là ? Tu es allé compter parcelle par parcelle ? Il s'agit ici de mesures totalement arbitraires. Imagine que je considère que les limites usuelles de l'Europe sont le massif de l'Oural à l'est et la mer Caspienne et le Caucase au sud-est, alors la Turquie fait entièrement partie de mon Europe. Tu vois à quel point cette histoire de chiffres est absurde ? Il n'y a pas de limites clairement définies de l'Europe. Ce qui est issu de données arbitraires ne peut être considéré comme un argument fiable et encore moins objectif. Ca a donc tendance à affaiblir ton raisonnement.

2. J'ai trouvé une citation de Paul Valéry qui pourra peut-être t'intéresser. Il dit de l'Europe qu'elle est le "petit cap du continent asiatique". Ca met bien l'accent sur la difficulté qu'il peut y avoir à définir les limites du continent européen. Il écrit aussi que l'Europe serait l'ensemble des régions ayant subi la triple influence de l'hellénisme, de la romanité et du christianisme. Hellénisme, inutile de revenir là-dessus. Quant à la romanité et au christianisme, Constantinople fut au cœur de l'Empire byzantin, appelé aussi Empire romain d'Orient, l'Empire chrétien par excellence qui donna naissance à l'Eglise orthodoxe.

3. "La culture ne prend pas le pas sur la position sur le globe." Non. La culture, c'est ce qui lie les peuples. C'est primordiale. Par ailleurs, je me sens plus proche de la culture turque que de la culture estonienne ou lituanienne. Je serais incapable d'aligner trois mots sur le mode de vie, les usages ou la culture des pays baltes. Pourtant, Estonie et Lituanie sont membres de l'UE. Ici, c'est évidemment la culture méditerranéenne qui s'exprime, qui nous rapproche.

4. "Doit on considérer comme européen tout pays qui a une culture très proche d'un des pays de l'UE ? Je ne crois pas qu'il faille intégrer les USA sous pretexte qu'ils parlent anglais et appartenaient au Royaume d'Angleterre, ainsi que l'Australie, ou encore qu'il faut rallier l'Amerique de Sud en avançant qu'eux aussi parlent Espagnol et sont imprégnés de la culture espagnole." Ne raisonne pas par l'absurde. Tu sais très bien qu'un océan nous sépare. Toute l'ambiguïté de la Turquie, c’est justement qu'elle est à la fois si proche et si loin de nous, qu'elle est à la charnière de deux mondes. Si un océan nous séparait, la question ne se poserait pas. L'UE ne cherche pas à rassembler tous les pays partageant des valeurs communes à travers le monde, mais "seulement" ceux qui se trouvent en Europe.

5. Pourquoi pars-tu du principe que les musulmans turcs seraient intolérants vis-à-vis des chrétiens ? Et si l'islam était une religion de paix ? Si les Turcs étaient aussi racistes que tu le prétends, comment se fait-il qu'ils entretiennent de si bons rapports avec Israël ? Tu pars sur des préjugés. Encore une erreur.

6. "La démocratie, en Turquie, est bafouée." En effet, elle l'est. Je croyais avoir été assez claire sur ce point. Je suis tout à fait d'accord. Seulement, je considère que dès lors qu'un pays prouve au monde entier qu'il veut avancer, qu'il essaye par tous les moyens de quitter son enlisement (par la voie de manifestations ou l'engagement de personnalités tel que O. Pamuk, ou bien à travers des gestes symboliques comme ici ou ici), alors, il est du devoir de l'Europe de favoriser cet avancé. Il est du devoir de l'Europe de guider et d'encourager ce pays. Il est du devoir de l'Europe d'accélérer le processus. Dès lors que la Turquie aura reconnu le génocide arménien, mis un terme au conflit chypriote et proclamer haut et fort son engagement pour la démocratie, dès lors, il sera indécent de ne pas l'accepter dans l'UE ; non seulement parce qu’elle le méritera, mais aussi parce que nous pourrons en tirer un profit certain (cf., par exemple, les oléoducs dont j'ai déjà parlé). Bien sûr, ça prendra un certain temps. Mais je suis persuadée que ça viendra. D'ici 5 à 10 ans, la Turquie pourrait être prête.

7. Enfin, je crois qu'in fine, nous ne sommes pas d'accord sur le rôle que nous voulons donner à l'UE. J'imagine (et j'espère) d'ici une cinquantaine d'années pouvoir voter pour mon Président de l'UE, vivre dans un Etat fédéral, avoir connu une vraie réforme des institutions européennes. Vivre, non plus au sein d'une association d'Etats, mais dans une Nation composée de plusieurs Etats. Je suis une européenne convaincue et persuadée qu’à ce titre la Turquie fera partie de l’UE à moyen terme.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

et le problème Kurde ?